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Vues et vécus en Algérie et ailleurs. Forum où au cours des jours et du temps j'essaierai de donner quelque chose de moi en quelques mots qui, j'espère, seront modestes, justes et élégants dans la mesure du possible. Bienvenue donc à qui accède à cet espace et bienvenue à ses commentaires. Abdelmalek SMARI

Sed humanum est

Ce que je propose au long de ce parcours, ça sera une série de thématiques, de sujets et de matières à réflexions. Je ne prétends avoir aucune solution à aucun des problèmes  humains que ces thématiques soulèvent. Je ne possède, en tant qu’être humain, aucune clé d’aucun mystère. Tout ce que je compte faire c’est attirer l’attention des indifférents, secouer les assoupis et éveiller la curiosité des esprits. Le rôle de la connaissance et de - son instrument – la critique est d’amener les gens à réfléchir. C’est là le but ultime et noble vers lequel tendent par nature la culture et l’activité de l’esprit en général. La survie de l’être nous le pose aussi comme impératif fondamental dont dépend jusqu’à notre survie biologique … et non seulement. Car il y va aussi de notre existence morale, de notre dignité, de notre liberté, de nos sentiments et de nos désirs. La connaissance nous permet moins d’accumuler des vérités que de détruire des préjugés. Elle sert à poser des repères pour nous orienter sur nos chemins et parcours plutôt que d’ériger des bornes ou des limites. Elle le fait à travers notre esprit grâce à sa capacité d’analyse et de synthèse. Son rôle est de dégager le vraiment utile et l’authentiquement juste et beau parmi les myriades de laideurs et de bêtises de notre existence ; de raffiner nos goûts et de nous adoucir la vie ; de traquer les monstres de la superficialité, de la médiocrité et de l’arrogance de l’être au monde; de redimensionner nos ombres en les précisant grâce à sa lumière et de nous rendre donc plus sociables et solidaires. Dans le texte inaugural « L’élégance engagée », j’ai parlé de l’homme sous sa forme d’algérien entre autres types d’hommes. Aujourd’hui j’ai l’intention de préciser cette notion( ?). Qu’est-ce qu’un algérien par exemple ? un homo berbericus, islamicus, arabicus … qui vit dans les insondables et mythiques réserves qui s’appellent Hic sunt leones ? est-il quelqu’un qui parle français … cassé ? qui aspire ou tend à la francité, à Nos ancêtres les Gaulois, aux landes des celtes, aux caucasiens ? est-il oriental et à la fois occidental (maghrébin) ? un nomade qui a pour gîte le dos du dromadaire, pour langue les primitifs you-you et pour foi la cimeterre ? un amazigh qui se rebelle pour se rebeller et qui finit toujours – tel Atlas – par être dompté, assujetti, écrasé sous le poids des immondes clichés et autres mystifications ? L’algérien est-il corsaire fils de corsaires ? est-il ce hors-la-loi ? ce fellag ? ce damné de la terre converti malgré lui en révolutionnaire ? qui se reconnaît en Danton ? en Guevara, Nasser ou Boudiaf ? un têtu donc par nature qui, souvent, use la tête pour donner des coups, pas pour réfléchir ? une sensibilité orpheline, isolée de l’histoire, en marge des mémoires ? est-il cette sensibilité éternellement écrasée entre deux mers, un désert et un lointain orient qui se veut plus proche ? sensibilité orpheline autant que naïve qui, sous la pression de l’horrible solitude, voit des amis et des proches non pas au seuil de la porte, mais à la porte sublime, et au-delà même … jusqu’à la muraille de Chine ! Pour moi, un algérien c’est d’abord un homme. Il peut bien être un parasite de la culture et des technologies modernes. Il peut même les profaner par ses mufleries et ses grossièretés. Ça n’empêche pas qu’il reste fidèle à ses cohérences et ses bêtises, à ses joies et ses douleurs. Il est plein de mémoires et de rêves. Il porte aussi des deuils et des plaies éternisées par l’injustice des hommes et la vanité des jours. Il est, lui aussi, dépositaire des inépuisables trésors de douceurs de l’Homme. Il est paradoxalement le gardien fidèle de ses misères, de ses craintes, de ses remords. Il a de toute façon sa dignité et sa liberté. Mais il est habité par sa bêtise propre et celle des autres qui menacent sans cesse ces joyaux précieux. D’où son combat souvent gauche et acharné mais toujours noble. Combat perpétuel qui ne lui donne pas de répit. Il lui arrive aussi de prostituer sa liberté et de la troquer contre la lâcheté ou le servilisme d’un moment ou d’une époque. S’il en est ainsi c’est que souvent l’algérien se trouve dans le noir, dans l’incapacité de muer ce noir – inhérent à l’existence humaine- en blanche lumière. Alors, si une main amie lui lance une torche, oubliant de la lui allumer, il lui arrive de ne pas l’attraper et reste dans le noir. Et s’il la prend, il se peut qu’il se la mette, telle une sucette, dans la bouche. Il se peut aussi qu’il la jette tout court, n’ayant aucune idée de son usage. Sed humanum est. Un algérien existe donc comme homme. Et puis a-t-on le droit de douter de son existence ? L’être n’est pas ce qu’il dit d’être, mais il est ce qu’il est. Avoir la langue agile et prompte à catégoriser est le propre de l’arrogante ignorance. Catégoriser c’est abstraire, c’est réduire, c’est vider la forme de la substance. Catégoriser c’est ne pas se lasser de jeter des lests, jusqu’à ce que le corps à traiter - pourtant fait de matière opaque - se volatilise. Triste sort que celui d’une vie exubérante calcinée par l’aridité de la bêtise humaine ! corps pleins de vie qui deviennent des ghirbas sèches, des peaux carbonisées cachant mal des squelettes démontés. Cimetières des voyageurs  - humains ou animaux – carbonisés par le soleil de quelque désert là où les rapaces n’osent pas s’aventurer ! Catégoriser c’est ça. C’est le jeu préféré de la sadique systématique. L’homme algérien existe donc, comme peuvent exister un marocain, un tunisien, un italien ou un français. Et puis, son inexistence serait une absurdité. S’il n’existait pas, l’autre, le marocain par exemple, pourrait-il se définir ? et par rapport à quoi ? absurde illusion spéculaire ? certes, mais décent et pertinent raisonnement à la Sartre ! Oui, vous voyez qu’on doit notre existence à celle de l’autre. Nous serions cette matière - opaque ou diaphane qu’elle soit - qui lui renvoie son reflet ou son ombre. Et c’est en ça que consiste notre complicité et notre solidarité.

 Smari Abdelmalek                                                                   

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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