Vues et vécus en Algérie et ailleurs. Forum où au cours des jours et du temps j'essaierai de donner quelque chose de moi en quelques mots qui, j'espère, seront modestes, justes et élégants dans la mesure du possible. Bienvenue donc à qui accède à cet espace et bienvenue à ses commentaires. Abdelmalek SMARI
« La confiance est un élément important dans la vie politique.
Pour aider l’économie à créer des richesses, il faut apporter
des modifications institutionnelles de telle manière à ce que
n’importe quel citoyen ou agent économique puisse déposer
plainte contre un inspecteur des impôts, un officier de douanes
ou un chef de service de wilaya. »
Lahouari Addi - El Watan 15-03-10
Mais la corruption ne se limite pas seulement aux milieux où sont en jeu les bas intérêts charbiens; ce fléau nidifie nécessairement et inexorablement là où l'on flaire un brin de pouvoir. Voilà pourquoi on le trouve à trôner aussi dans les hautes sphères de l’Information alias 4e pouvoir.
Prenons l’exemple de la presse et de l’édition algériennes (il va sans dire que c’est le même constat partout dans le monde) qui à première vue semblent être chantre et maître incontestés de la démocratie (qui dit démocratie, dit information libre et indépendante).
Dans les rubriques que certains de nos journaux ont réservées au lecteur, invité à faire part de ses impressions sur des sujets de l’heure traités par lesdits journaux, on peut y lire entre les lignes une sélection qui a pour seul critère fondamental et déterminant la censure sans appel de tous les arguments qui pourraient démentir ou oseraient critiquer les assertions de la ligne éditoriale idéologique de ces organes d’information.
Nous devons reconnaître que pour le lecteur, avoir droit à exprimer son avis dans les journaux est une aubaine. Une belle action de la part des journaux, n’est-ce pas ? Un beau geste de générosité et de gentillesse… eh bien ce qu’on peut noter c’est que souvent les commentaires des lecteurs ne sont pas publiés. L’on peut se rendre compte de cet état de choses, en faisant une petite enquête ou simplement en regardant parfois les prémisses de ceux qui écrivent et qui « se mettent les mains en avant » comme pour conjurer la censure ou le sort de leurs écrits en disant avec des tons résignés « … si mon écrit sera publié… » ou bien « … j’espère qu’on me publie ces mots… » ou bien encore, devançant le journal, ils prononcent eux-mêmes la sentence qui les censure « … je sais que mon avis sera refusé… »
Ceux que nos journaux acceptent de publier sont ces discours mêmes qui caressent leur idéologie dans le sens des poils. On a beau leur demander des explications ; en cela ils se comportent en bête noire de la démocratie et de la liberté d’expression, d'ailleurs tout comme nos gouvernants - pourtant considérés par eux-mêmes comme le mal absolu et irrachetable!
En fait nos journaux ne cessent de fustiger à longueur de jours et d’articles ces « tyrans » de gouvernants. En cela il n’y a pas de différence notable entre les sentences plates et souvent partiales des masses borgnes et chaotiques de notre plèbe et celles des éditorialistes de nos organes d’information dits libres et indépendants. On y relève presque les mêmes impressions floues et subjectives pour ne pas dire tendancieuses. Impressions perverties par l’aliénation servile, la stupidité arrogante et le plus béat des égoïsmes…
Et dire que nous, avec l'organe pensant de notre Cité (presse et édition), nous avons quelque chance de nous en sortir de ce bourbier de médiocrité dominée par la corruption ! Heureusement que notre information ne dépend pas seulement de ces organes d’information…
Pour paraphraser Kamel Daoud, je dirais : "C’est avec de l'honnêteté citoyenne qu’on aurait du poids face au régime et qu’on pourrait exiger de lui de respecter la démocratie et de la faire respecter. Alors la démocratie ne dépendra plus du pétrole (ou du Pouvoir qui donne à manger au peuple en contre partie de son silence de complicité et de soumission) mais de notre effort."
Vu l’ampleur du phénomène, on pourrait voir dans des mots comme celui de M. Addi (cité au frontispice) de rêves lointains; comment serait-il possible au juge, qui est aussi l’adversaire, d’être à la fois juste, d’écouter le plaignant et de lui rendre justice ? Ici il faut entendre par juge la personne qui devrait combattre la corruption et par adversaire la personne corrompue, qui se laisse corrompre ou qui corrompt.
Il y a une année, de passage à Brugges, j’ai rencontré un jeune homme de Skikda qui avait vécu pour un temps à Rome. Nous avons parlé, comme tout Algérien qui se respecte, de la misère morale qui suffoque nos concitoyens, nous avons parlé de tout et de rien et évidemment de l’immanquable sujet de l’heure : la corruption.
A la fin de la causerie, le Skikdi tira de sa poche la photocopie d’une lettre encore fraîche qu’il venait juste de poster. Il avait la manie - me raconta-t-il - de garder un exemplaire de toutes les lettres qu’il envoie au pays et à ses amis.
« Cette lettre, me dit-il, est la troisième du genre adressée cette fois à une connaissance qui a une haute responsabilité dans la direction des douanes de l’est. Que veux-tu, il ne nous reste paradoxalement que la corruption pour lutter contre la corruption ?! J’ai envoyé ma dénonciation à certains journaux, toi en as-tu reçu quelque réponse ?! moi, non.
Je l’ai ré-écrite et je l’ai envoyée une seconde fois, mais trois mois sont passés sans que j’en aies eu aucune réponse ; rien… silence… complice… total ! Alors j’ai décidé de recourir au cousin lointain d’un ami… Je sais, je sais c’est du benammisme, mais je dois tenter ma chance, non ? Cette gangrène, il faut au moins qu’on la dénonce, qu’on sache qu’elle est un mal, un fléau, une lâcheté. »
C'était une lettre cordiale et pleine de gentillesses et de bon sens. De bon sens puisque quiconque le veuille, pourra vérifier la réalité des faits auxquels elle faisait référence, en se transmuant en simple voyageur devant traverser les frontières terrestres entre la Tunisie et l'Algérie.
« Et puis, ajoute le Skikdi, peut-être que les journaux ont-ils raison: qui peut nier un tel phénomène aujourd'hui? Tous (Algériens et non) en sont au courant, puisqu'ils l'exercent ou l'ont exercé au moins une fois dans leur vie. Et alors à quoi bon jouer à défoncer des portes déjà grand-ouvertes ? Tout le monde est complice puisqu’il connaît l’existence du mal et l'approuve par son ignorance des conséquences, son silence, son fatalisme ou son indifférence. »
Ladite lettre, comme vous apprendrez, chers lecteurs, parlait du calvaire que subit, à ses propres frontières, un citoyen qui décide d’entreprendre un voyage à l’étranger. Elle parlait aussi de la tchippa-bakhciche que notre voyageur (avec beaucoup d'autres) doit payer à certains délinquants (malheureusement habillés en douaniers ou en pafistes) qui abusent de leur pouvoir pour dérober le citoyen. Pourtant ces personnes ont tous les droits de voyager. Droits que la nature, la loi et l’évolution des mœurs lui ont reconnus gratuitement !
Leurs bourreaux d'extorqueurs-racketteurs commettent leurs méfaits en se cachant derrière leur fonction de gardes de frontières et salissent ainsi l’image de notre P.A.F. et de notre Douane, salissent notre drapeau et salissent la réputation de tous les Algériens.
Avant de procéder, j’aimerais citer l'indignation de Abdelmak Sayyed devant le misérable dictat des décrets d'application de la loi des finances de 1982. Indignation qu'il avait confiée au chapitre « Un rapport de domination » de son ouvrage « La double absence ».
Cet édit de politique grossière, ignare ou maladroite, « … imposait aux émigrés algériens (salariés, chômeurs ou pas et membres de leurs familles etc.) de changer durant leur séjour en Algérie, au moins l'équivalent de 700 dinars algériens (c'est à dire 1070 francs français [de l'époque]), tandis que – parait-il – pour les émigrés commerçants et pour les gens de professions libérales les impositions soient d’une somme supérieure. »
L'auteur de « La double absence » trouvait cette mesure un peu humiliante puisqu'elle considérait de fait les émigrés comme des parasites qui devaient payer leur séjour dans leur patrie!
L'Algérie, qui avait investi sur ‘‘son’’ émigration, se trouvait ainsi auto-lésée pour ne pas dire perdante. Avec la loi des finances de 1982 elle comptait pallier à la baisse de la contribution des émigrés à l’économie nationale, mais puisqu'elle n'avait pas su s'y prendre, elle avait perdu en plus du flousse sa crédibilité et commis ainsi, selon les termes de Sayyed, un attentat contre sa souveraineté interne.
Déjà « Les émigrés - ajoute notre auteur - n'envoyaient pas, avec des moyens visibles (les mandatas postaux), plus du 27% en 1979 (et certainement une part beaucoup plus réduite encore aujourd'hui) de ce qu'ils avaient envoyé durant l'année 1971(!). »
L'État, avec cette mesure gauche, n'avait fait que donner un alibi et une paix de conscience à ces fils égoïstes de l'Algérie qui vivent ailleurs et qui ne savent pas être reconnaissants à leur pays et aux leurs. D'ailleurs, en ça ils ne diffèrent pas trop de cette grande frange de leurs concitoyens "sédentaires" qui ne paient que sous la contrainte et la sanction, les impôts, le loyer, l'eau, l'électricité...
L'État algérien avait oublié peut-être que ses émigrés étaient encore de l'étoffe de berbericus. Il pensait peut-être que vivant en France, où ils ne seront même pas sollicités pour payer ce qu'ils doivent payer à l'État français (parfois avant l'échéance même), nos concitoyens émigrés auraient entre temps appris quelques règles de civisme, comme par exemple celle de contribuer à l'alimentation des caisses de leur État pour l'édification d'un pays qui reste tout de même le leur, d'un pays où ils comptent au moins être inhumés.
La loi des finances de 1982 fut un bon alibi pour notre « bon peuple », en lui donnant des assises justificatives, presque une légalité, afin de consolider et assumer une vie corrompue et parasitaire. Et il ne fallait pas tant pour convaincre berbericus de la justesse des ses vues… égoïstes.
Et il ne fallait pas tant pour que berbericus érigeât sa corruption (trafic de devises surtout) en une praxis sociale légitime, en un droit inaliénable!
La lettre
Cher B. je vous écris cette lettre pour le plaisir de me mettre en contact avec une personne gentille et honnête comme vous. L’amitié, je le sais, est un être bipède. Elle a besoin de ses deux jambes pour pouvoir se tenir debout et marcher.
Si je vous choisis comme ami, je ne suis pas sûr de le devenir pour vous. Donc tout peut s’écrouler si, vous, l’ami en devenir, décidez de ne pas répondre à mon appel.
Excusez-moi cette audace ; c’est que ça fait des années que je me comporte de la sorte : je m’interroge sur tous mes actes et sur toutes mes intentions.
Je voudrais aussi vous prendre comme témoin, non seulement parce que vous êtes un fonctionnaire de l’Etat, non pas parce que vous êtes une personne qui inspire sécurité et confiance mais parce que vous êtes simplement un homme digne de ce nom.
Un homme est quelqu’un qui combat avec courage et lucidité la médiocrité et l’injustice.
Un homme, c’est quelqu’un qui se respecte et réussit à respecter les autres indépendamment de la couleur de leur peau, de la langue qu’ils parlent, de la religion qu’ils professent, de l’idéologie qu’ils épousent, du mode de vie qu’ils choisissent et adoptent…
Je ne vous connais qu’ « en quelque sorte » mais je me permets d’espérer, pour l’Algérie, en des hommes comme vous. Ces hommes sont rares mais ils existent bel et bien chez nous. Ils ne cessent, dans l’anonymat de leur solitude, d’œuvrer pour le salut de notre pays et pour la dignité de nos concitoyens. Seulement, les fruits de leurs efforts ne se voient pas car la médiocrité de nos mœurs, notre mollesse morale et notre paresse mentale, malheureusement, dictent à nos âmes malades (d’ignorance historique et d’indifférence civilisationnelle) l’ordre de les ignorer ou de nous en moquer.
Oui c’est la conjugaison de notre malheureuse position historique, de la démonisation-condamnation que nous subissons actuellement de la part des puissances dominatrices, de notre immuable statut de damnés de la terre (encore !) qui nous a réduits à ce que nous sommes : des êtres insignifiants par rapports aux peuples des nations vives.
Cher B. sachez que le jour où j’ai du subir mon calvaire (qui est l’objet de la présente lettre), je me suis rendu compte qu’en réalité, nous les Algériens, nous sommes en train de vivre dans une situation absurde où manquent les deux piliers fondamentaux de toute possibilité de vie en société à savoir : la foi dans la vie et le respect de la loi.
Quand on est en règle avec tous les documents, quand on est en règle avec le temps (j'étais arrivé à l'heure pour faire mon check-in au guichet de notre « Unique » compagnie aérienne), quand on n'est pas un repris de justice ni un recherché pour quelque délit, quand on respecte scrupuleusement la loi, quand on fait en sorte que rien ne nous soit reproché... je ne vois pas pourquoi nous prive-t-on de nos droits?
Quand on voit ses droits bafoués absurdement, avec arrogance, sans explication, sans recours, sans l'espoir de compter sur rien ni personne; quand on est écrasé par des gens (simples citoyens comme vous et moi) qui sont censés représenter la loi, la respecter et la faire respecter, quand on arrive à un tel degré d'injustice et d'humiliation... quel espoir nous reste-t-il? Quel saint pouvons-nous invoquer?
Croyez-moi cher B., dans ce genre de désespoir il arrive au plus fervent des musulmans de se demander où puisse se trouver Allah et de douter de son existence même!
Quels mots nous restent-ils pour dire notre calvaire et notre passion (inutiles d'ailleurs et absurdes) si non ces mots de la résignation et de l'agonie: « Chez nous il n'y a ni foi ni loi?! »
Je ne veux pas et je n'ai même pas l'intention de dire par ces mots que quelqu'un en particulier (fut-ce le président de la république en personne) soit responsable de cet état de traitements insupportables que subissent les Algériens les uns par les mains des autres. Et pourtant le mal existe et a déjà atteint les proportions pandémiques d'un fléau social! Le mal existe donc, comme doit exister nécessairement quelqu'un qui le commet, ou non?
Pour ce qui me regarde, étant donné que vous êtes un haut fonctionnaire de l'administration en Algérie, je recours à vous.
Vous pouvez me dire: « Alors si ce n'est pas de notre faute, si la responsabilité est de tous et de personne, pourquoi tant de dérangements?! »
Vous pourrez avoir raison à penser ainsi, mais la vie nous enseigne que, souvent, nous pouvons changer les choses de la vie pour peu que nous commençons par changer nous-mêmes. Il est temps que l'Algérien se mette à penser positif: choisir le camp de la raison, de la beauté et de la justice, enfin choisir le camp de la dignité.
Bref, moi, j'avais réussi quand-même à trouver une solution à mon problème avec, en plus, une leçon de la vie! Mon calvaire, ma fatigue, mon amertume, ma solitude et le lot de mes humiliations m'ont enseigné de ne pas désespérer ou baisser les bras face aux dictats des minables ignorants et arrogants. Au contraire, cette difficile expérience m'a rechargé les batteries de l'espoir actif pour comprendre le malaise de notre âme, cette malheureuse malade chronique.
Les problèmes, s'ils doivent naître, ils sont aussi faits pour être affrontés. Et seuls les lâches et les arriérés mentaux n'osent ou ne peuvent comprendre cette dimension fondamentale de l'existence humaine, de la vie tout court.
Les guichets de notre unique (Air Algérie) m'ayant interdit de monter en avion - sans pour autant daigner me rembourser au moins le billet - alors j'avais recouru à une solution pénible et longue: le passage par les frontières terrestres.
Arrivé au poste frontières algéro-tunisien, j'ai vu de mes propres yeux pour la première fois de ma vie des pauvres gens (nos taxieurs clandestins) payer pas moins de 1000,00 D.A. (le quart de ce qu'ils gagnent dans une course Constantine/Tunis) à des pauvres (en moralité) employés de notre police ou de nos douanes pour passer!
Ces mêmes taxieurs et leurs « racketteurs » refusent de payer un sou pour s'acquitter de l'impôt légal à l'État, le loyer à l'O.P.G.I., le gaz et l'électricité à la Sonelgaz, l'eau à l'Algérienne de l'eau... si ce n'est sous la contrainte de la menace ou de la cravache!
L'idée de devoir les dénoncer s'empara de moi et j'avais pensé aux journaux qui, bien sûr, souvent donnent à croire qu'ils sont plutôt de la part du bricolage politique que de celle de la légalité sérieuse ou du contrôle des institutions par les citoyens eux-mêmes.
Qui sait peut-être auraient-ils l'intention diabolique de laisser empirer davantage la situation pour régler leurs comptes à certains gouvernants qui leur sont antipathiques ?
Et puis ne font-ils pas eux-mêmes partie d’homo berbericus avec qui ils partagent les rares innocences et les innombrables tares de la misère morale ?
Alors la providence avait mis sur mon chemin votre cousin qui m'avait parlé de vous et de votre volonté de lutter contre ce cancer.
« Comment Monsieur B. se serait-il comporté, ai-je pensé, face à cette situation intenable? »
De toutes les façons vous êtes le mieux placé pour y faire quelque chose: envisager une inspection inopinée par exemple de ces lieux suspects ou une enquête. Il vous est plus facile de dénoncer cette pratique honteuse et grave… et puis vous serez plus crédible et écouté.
Dernièrement j'ai lu sur les journaux que le gouvernement algérien s'est attaqué sérieusement à ce fléau pour le combattre. Que dieu soit avec lui dans cette entreprise ingrate et ardue !
Le comble c'est qu'à 20 mètres linéaires de nos frontières, chez nos voisins tunisiens, je n'ai rien pu relever de douteux... et j'ai fait le même voyage plus d'une fois!
À 20 mètres de nos frontières tout paraît propre, serein et, dirais-je, simplement organisé et transparent. Il n'y a pas trace d'arrogance ou de manque de professionnalité administrative, pas de mauvaises habitudes chez les employés de la partie tunisienne. Le voyageur est respecté, et s'il se trouve des personnes aux pratiques louches, les employés ne manquent pas de leur parler le langage clair de la loi de leur pays.
Ceci ne veut pas dire que nos voisins soient des anges ou des froids automates administratifs. Tout comme nous, ils ont certes leurs problèmes et leurs misères ; autrement ils ne feraient pas partie, eux-aussi, du tiers monde.
Je les ai observés: ils savent être indulgents et compréhensifs mais je ne les ai pas vus abuser de leur pouvoir (?) pour humilier les pauvres (soumis) voyageurs ou les pickpocketer.
Nos voisins, les employés tunisiens (douaniers et pafistes), ont le visage humain. Ils ne sont pas pour autant morts ou écrasés pour leur mollesse (là où il y a modestie et conscience professionnelle, l’Algérien voit faiblesse et méchanceté). De toute façon sur le plan professionnel, les deux postes frontières (algérien et tunisien) restent quand même incomparables.
Et c'est scandaleux! Et c'est incompréhensible aussi! Et il faut absolument dévoiler ce mystère. Aussi loin que je suis allé avec mes réflexions et mes hypothèses, mon esprit m'a toujours indiqué, comme explication plausible, l'absence de la foi dans la vie chez les Algériens et l'aversion pour les lois et la discipline qui règlent la vie en société et la rendent vivable.
Votre cousin m'avait pris un autre billet via Internet à partir de Bruxelles. Le lendemain matin, j'avais trouvé mon poste dans l'avion et retrouvé ma dignité d'être un homme parmi les hommes dignes...
C'est incroyable ce que les nations vives et honnêtes peuvent garantir à leurs concitoyens - et à leurs hôtes aussi, même si ces hôtes viennent du tiers monde ! – en matière de services et de respect surtout!
Quand l'avion décolla, de chaudes larmes me montèrent aux yeux. Il n'y a pas que des larmes de joie ou de détresse; il y a aussi les larmes de la stupeur. J'ai pensé alors: « ce qui nous manque, à nous Algériens, c'est le courage d'assumer la responsabilité de ce que nous sommes, ce que nous éprouvons, ce que nous pensons et ce que nous faisons. Rares sont les personnes, dans notre pays, qui font exception à cette règle: qui se comportent en vrais responsables.
Cher B. la raison de notre lâcheté et de notre défaitisme est due certes et avant tout à l’avilissement que nous avaient fait subir la domination turque et le système colonialiste français. Mais une part de cette responsabilité revient certes aux gouvernants de l'Algérie indépendante, mais moins à leur mauvaise foi qu’à leur inexpérience dans l'art de gouverner.
Je sais que notre pays compte peu de fils consciencieux. Mais les autres aussi le sont, à leur manière bien entendu ; seulement qu’ils sont consciencieux à des proportions parfois négligeables et donc inefficientes. Il faut en conséquence les aider à braver le destin et l'héritage de l'histoire noire, à être courageux et justes, à s'initier à la culture du respect et de la dignité.
Voilà cher B., je me suis permis de vous importuner avec certains de mes états d'âme qui relèvent aussi de mon souci de me comporter en homme sociable et en citoyen consciencieux. Vous avez tout le droit de juger ces paroles pourvu-que vous y mettiez de la bonne critique.
Merci pour votre gentillesse et excusez-moi de vous avoir importuné.
Brugges le ../../..»
à suivre
Smari Abdelmalek