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Vues et vécus en Algérie et ailleurs. Forum où au cours des jours et du temps j'essaierai de donner quelque chose de moi en quelques mots qui, j'espère, seront modestes, justes et élégants dans la mesure du possible. Bienvenue donc à qui accède à cet espace et bienvenue à ses commentaires. Abdelmalek SMARI

La ir-raison égoïste chez berbericus l'homme de fassade ou à tout Oultache un Tounsi (5 et fin)

 

« Depuis les années 1950, la social-démocratie

norvégienne a défendu l’idée que l'État doit

faciliter la représentation démocratique la plus

diverse, en apportant un soutien économique

massif à la presse, à la culture, à la société civile

et aux partis politiques. »

Remi Nilsen, Le Monde diplomatique, Juin 2010

 

 

Pour une thérapie efficace et qui dure dans le temps; peut-on vraiment y faire quelque chose?

 

« Nous ne changerons pas de vie – soutient d'autre part José Saramago - si nous ne changeons pas de vie... Mais pour que cela puisse se faire, il est aussi nécessaire et urgent de dénoncer radicalement tous les facteurs qui empêchent cette transformation, facteurs économiques, politiques, religieux, culturels... »

Peut-on vraiment combattre la corruption, el-fassade? Certainement, mais à condition que l'on y mette de la conscience et de la discipline; quand les Algériens apprendront à se détacher de leur égoïsme, à s'en éloigner; quand ils apprendront le courage de sacrifier leurs bas intérêts pour ceux plus grands, plus justes, plus durables, pour ceux qui profitent à tous les membres de la cité.

C'est loin comme objectif, mais il suffit qu'on en ait conscience pour qu'on se trouve déjà lancé sur le chemin de la moralité et du civisme. La persévérance fera le reste.

Il faut arriver à se fixer cet objectif stratégique, car notre société est gravement affectée du mal de la corruption (il suffit de regarder alentours ou de feuilleter l’actualité de chaque jour). C'est un véritable fléau qui la traverse de part en part. Il n'en épargne aucune strate de notre société, aucune catégorie sociale, aucune région de notre pays! En témoignent les organismes internationaux, les O.N.G., l'État même, la société civile, les journaux, les services de l'ordre et tous les citoyens qui résistent encore à cette pourriture.

Quant à moi je poursuis cet écrit avec d'autres exemples négatifs, conséquence directe de cette culture, notre culture, malade et corrompue et pourrie et condamnée.

« La déclaration de la plupart des responsables et fonctionnaires de l'État ont avoué, dans le cadre des déclarations des biens personnels comme le stipule la loi anti-corruption de 2006, de posséder des logements O.P.G.I. bien que la loi ne leur ouvre pas droit puisque leurs revenus dépassent de loin les 12000,00 D.A. » Slimane H. El Khabar 20-02-10.

Quidams et « honorables » citoyens ne reculent devant rien pour assurer leurs bas intérêts égoïstes. D'autres apprenti-busnesmen essayent de corrompre certains douaniers dans le but de passer ou de faire passer leur marchandise plus vite que les autres et pour éviter de s’acquitter des droits de douane; ils préfèrent « acheter la route », une route illégale, à des prix exorbitants - comme l’explique le directeur des douanes M. Bouderbala (El watan 04-11-09).

C’est la conséquence de l’irrationalité, du non professionnalisme qui régit l’esprit de notre commerçant.

Seulement et là j’ajoute : notre commerçant ne compte pas gagner uniquement mais plutôt ne pas prendre de responsabilité, méfiance originelle oblige ? divorce entre l'État et le citoyen s’entend.

En Italie pour ouvrir un bar, on oblige l’aspirant kah'ouadji à faire une formation théorique avec un stage pratique où il apprendra à gérer son travail avec discipline, à assurer l’ordre et la propreté, à veiller à rendre avec la monnaie sourire et ticket fiscal, à faire ses comptes avec les banques, à connaître ses obligations et ses droits fiscaux, à investir, à traiter avec condescendance et respect les clients quels qu’ils soient. Et ça indépendamment de l’existence ou non de la concurrence.

Hélas, chez nous, quiconque s’improvise tout sauf ce qu’il est vraiment : le médecin est marchand de bétail, l’ingénieur taleb qui écrit des talismans, le gardien de moutons expert en finances, l’apprenti électricien spécialiste en relations internationales, le journaliste ou le philosophe expert en imamologie…

Ce genre d’aberrations arrivent quand on est incompétent dans ce qui doit être son propre domaine ou son vrai métier. C'est comme si dans les gènes mêmes des Algériens était inscrite la tendance à être des ratés et par conséquent la tendance à combler ce manque (magiquement, en cherchant des raccourcis) en usurpant les métiers, les uns des autres, et à se sentir toujours incapables de réaliser une vie honnête.


 

Où est l'État ?

 

Dans un article du quotidien arabe El-Khabar daté du 29-10-09, Hamid Zaatchi, se basant sur les déclarations de l’économiste Malek Saray, parle de l’existence de plus de cinq millions d’émigrés algériens entre ceux officiels (enregistrés par nos consulats) et clandestins (non reconnus par les pays hôtes et non enregistrés par nos consulats). 98% de l’argent en devise (plus de 3 milliards de dollars, mais la capacité réelle est estimée à sept milliards de dollars) - que ces fils de l’Algérie rapportent avec eux chaque année pendant leurs vacances au bled – est changé en monnaie nationale au dehors des structures monétaires officielles. Cette hémorragie financière est certes une œuvre satanique, va-t-il sans dire, des réseaux de trafiquants de drogues et d'armes et des lobbies de l’import. Ainsi ces commerçants de l’infâme détiennent-ils jusqu'à 40% des 140 milliards de dollars des revenus de l'État en devises !

L’autre cause qui n’en est pas moins scandaleuse est que les banques algériennes n’ont aucune volonté politique de contribuer à l’éradication de ce fléau : elles n’ont pas daigné ouvrir des succursales dans les pays mêmes où existent nos ressortissants algériens comme est le cas en Egypte, en Tunisie ou au Maroc et jusqu’au fort « arriéré et tribal» Soudan !

Le comble est l’absence sur le territoire national même des guichets de change. Et dans l’aéroport - soi-disant international - d’Alger, l’on ne compte que deux guichets de change avec la fort gênante présence des essaims de guichets ambulants qui leur font concurrence et qui leur dérobent les clients (ils ne font pas de différences, les honteux infâmes, entre nos ressortissants qui vivent à l’étranger et les Étrangers) de sous leur nez et sous le regard impuissant ou complice des agents de sécurité dudit aéroport et de la police.

Quant à l’aéroport de Constantine, lui aussi dit international, tout simplement je n’y ai pu relever personnellement l’existence d’aucun guichet de change ! Pour comparaison, l’aéroport de la petite capitale du tout petit pays voisin qu’est la Tunisie compte 15 guichets officiels et zéro guichet ambulant. Et si vous trouvez dans la ville de Tunis quelques vendeurs de devises, il n’y pas de doute que ces dits vendeurs soient algériens ! À propos de l’expression « vendeurs de devises », quand j’étais arrivé tout frais en Italie, j’avais raconté à des amis des choses sur nos mœurs. J’étais étonné de leur ignorance quant à cette expression ; ils me disaient : « Mais qu’est-ce que ça signifie Vendre les devises ou les acheter ? Es-tu sûr d’entendre ce que nous en entendons ? »

Comme vous pouvez remarquer, chers lecteurs, leur étonnement n’avait rien à envier au mien. Quant à moi, j’avais tâché d’oublier, de bannir de mon glossaire une telle expression de honte et de ridicule.

Nos guichets ambulants, continue l’article de El-Khabar, proposent malheureusement à leurs clients des taux plus alléchants que ceux que leur proposent les guichets officiels ! La gente ci casca, comme disent les Italiens, les gens cherchent leurs intérêts ! L’auteur de l'article impute cette prodigalité au fait que ce qui intéresse ces spéculateurs ce n’est pas tant le gain qu’ils en tirent (par rapport au cours officiel) que l’évasion de ces sommes de devises.

Ça peut être ainsi, mais selon moi, ils sont prodigieux pour la simple raison qu’ils ne paient pas d'impôts, et s’ils font des remises, ils demeurent toujours gagnants, car ils les retranchent des sommes qui reviennent à l'État. Ils sont en ça comparables aux industriels des pays du tiers monde qui spéculent sur le non payement d'impôts, le bricolage, le sous payement des leurs ouvriers pour présenter au marché des produits compétitifs et qui font parfois trembler jusqu’aux pays de grande efficience capitaliste et productive comme l’Allemagne.

Dans tous les cas, ces criminels encore en circulation et en action libres, travaillent pour appauvrir l'État avant tout pour l’affaiblir et s’assurer ensuite et enfin l’exploitation et la prédatisation (en faire une proie sans défense) sans lois ni contraintes de toute la société.

El Khabar parle déjà de la capacité acquise chez ces mafias et leurs hommes de mains et complices d’un pouvoir financier immense et tel qu’il peut menacer l'État, le faire chanter, le mettre à genoux, le dompter, le tuer à la fin du parcours.

Ce pouvoir financier atteint en ces jours plus de 60 milliards de dollars ! Un véritable budget d’un véritable État ! La situation est tragique surtout quand on sait que ce que les forces de l’ordre (les douanes) peuvent récupérer de ces fortunes perdues ne dépassent pas les quelques dizaines de millions de dollars ! Juste la somme qui sert à payer les douaniers déployés et mobilisés dans ces opérations ! Où est l'État ?

Il m’est arrivé personnellement de tribuler entre trois, quatre de nos banques à Constantine pour pouvoir exercer mon droit au change, avant d’opter finalement pour la banque centrale ! et encore ; là aussi, je suis tombé sur quelqu’un, un employé de ladite banque, qui m’invitait à changer dehors!

Ce seigneur, aux mimiques d’escroc, se reconnaît par son habit gris, par sa manière fainéante d'arpenter les bureaux, par sa disponibilité à donner des informations et surtout des avis et conseils aux clients… il se peut même que le Monsieur soit un responsable, à moins qu’il soit là comme détaché de la place de la Brèche à la recherche des clients… Ce seigneur, me voyant au guichet, m’apostropha :

- Monsieur, vous désirez ?

- Je voudrais changer l’euro, lui répondis-je, tout en me disant « en voilà un qui finalement ressemble bien aux employés de bureau des pays civilisés ! Il fait davantage ; il n’attend même pas qu’on lui adresse la parole, qu'on le supplie ou qu’on s’introduise de la tête à travers la vitre du guichet pour qu’on le serve ! »

- Combien ?

- Trois cents cinquante. Lui répondis-je, avec naïveté, sans soupçonner pour rien au monde son indiscrétion.

- Pas mal. Écoute, pourquoi est-ce que tu ne vas pas là, à la Place, on te donnera plus ?!

Je n’ai pas eu la présence d’esprit pour le remercier de son précieux conseil, le pauvre, car je pensais à sa stupidité… il ne sait pas, le misérable, qu’il était en train de faire faillir la boîte qui lui assure son salaire. Mais au pire, il n’y a pas de limites!


Misères et grandeurs des pays félix

Il va sans dire qu’il est à diagnostiquer de par ces comportements pervers de nous autres Algériens, les sempiternels mystifiés qu'un rien nous aliène et nous obnubile, la présence structurelle et chronique de ce mal qui ronge notre société: le divorce entre le citoyen (vecteur et garant de l’intérêt égoïste) et l'État chantre et représentant de l’intérêt général de justice et de solidarité pour la communauté entière.

Signe d’arriération morale est cette incapacité chez Berbericus de marier l’un et l’autre de ces deux types ou natures d'intérêts qui semblent foncièrement répulsifs et incompatibles l’un avec l’autre. Signe de cet arriération est l’absence même de l’idée que ces deux natures d'intérêts pourraient être affrontées dans la perspective de les concilier l’une avec l’autre ! Pourtant les sociétés moralement avancées nous font voir que non seulement il est possible de fondre les deux catégories d'intérêts dans une synthèse heureuse mais aussi que ça vaut immensément la peine de tenter l’entreprise et, plus encore, qu’il est urgent de la faire et nécessaire de préserver ce mariage félix. Car qu’est-ce que le développement sinon cette capacité de faire de l’intérêt public de la communauté un intérêt personnel de chacun ou vice versa ?

En attendant, les fils de l’Algérie se laissent bercer par leurs pauvres et préjudiciables intérêts ignorant qu’ils ne font qu’appauvrir l'État, donc leur pays, donc eux-mêmes.

Que faire ? il faut que l'État prenne avec courage et intransigeance ses propres responsabilités en préconisant des mécanismes de gestion de la chose publique efficaces, comme par exemple dans ce cas de figure « commerce de devises » la garantie et la titularisation des intérêts personnels des citoyens et leurs avoirs. Ainsi ils ne penseront plus à sauver leurs propriétés privées menacées, réellement ou fantasmatiquement, au dépens de l’intérêt général de l’Algérie et des Algériens.

« S’il est vrai, dit Carlo Alberto Dalla Chiesa, qu’il existe un pouvoir, ce pouvoir doit appartenir seulement à l'État, à ses institutions et à ses lois ; nous ne saurons outre déléguer ce pouvoir ni aux prévaricateurs ni aux usurpateurs arrogants ni aux malhonnêtes. »

L’unique commentaire qui s’impose est que l'État doit exercer le pouvoir d’abord d’une manière juste et démocratique et ensuite il doit le récupérer des mains criminelles.

Le 20 septembre 1949, le Chancelier Adenauer avait fixé trois objectifs stratégiques pour la nation allemande : la souveraineté nationale et l’égalité des droits avec les autres nations, la construction européenne, la réunification. Ces objectifs ont été atteints le 3 octobre 1990 (voir l’article de Henri Ménudier au Monde diplomatique – mai 2010).

Les Algériens n’ont pas encore acquis le sens de la moralité d’un Carlo A. Dalla Chiesa ou d’un Adenauer et de leurs concitoyens, mais il n’est ni tard ni interdit d’espérer et de se mettre au travail.

Commençons par apprendre à raisonner par principes sains (Dalla Chiesa) et par projets lucides et pertinents (Adenauer). L’objectivation de nos idées nous portera non pas tant à convaincre les récalcitrants ou les indifférents qu’à indiquer à nous-mêmes ce qu’on a à faire, ce qu’on veut faire, quand et avec quelles échéances, comment et avec quels moyens, avec quelles énergies… la mobilisation de toute la société et l’adhésion de tous les citoyens suivront nécessairement.

En mois d’octobre de chaque année, lit-on dans le même article de R. Nilsen (cité en frontispice), les déclarations des particuliers sont rendues publiques. « Avant Internet, pour prendre connaissance des revenus du maire, du voisin ou du commerçant local, il fallait se rendre au centre des impôts de sa ville, afin de consulter les listes, accessibles durant trois semaines… Les journaux, cependant, révélaient les revenus, le patrimoine et la fortune des personnalités publiques – responsables politiques, chefs d’entreprise, sportifs ou célébrités des arts et du spectacle. »

Bien sûr, il ne faut pas s’attendre que le Norvégien se comporte comme s’il était un ange ; car malgré cette mesure de transparence et d’égalité de tous devant les lois du pays, il peut se trouver quelque malin qui cherche à se jouer de ces règles de bonne gouvernance. Et M. Nilsen cite le cas d’une ancienne première ministre et ancienne directrice générale de l’OMS, Mme Gro Harlem Brundtland qui ne payait pas d’impôts alors qu’elle bénéficiait toujours d’une confortable retraite d’ex-députée et qui n’hésitait pas à se faire soigner dans des hôpitaux publics en Norvège… tout en vivant en France depuis plusieurs années !

Il est de certains fléaux sociaux (la corruption) comme l’envasement des digues : ça revient toujours et il faut en inscrire la lutte dans chaque programme, dans chaque agenda des actions du gouvernement et des citoyens conscients.


 

Quelques indications pour instaurer la culture de l'incorruption

 

Il y a deux mois, une maison d'édition milanaise, Melampo, organisa une série de débats autour du thème "Les fils qui écrivent de leurs pères". Ces rencontres visaient en réalité l’objectif d’étaler devant les yeux des citoyens le problème épineux de la corruption en Italie. Un drame national qui n’arrête pas de saigner le pays, avec des vies humaines et des milliards d'euro perdus par an.

Mais les Italiens savent se défendre, évidemment. Ils ne laissent pas d’interstices au provisoire et au bricolage. Leur lutte est systématique et engage toute la société, d'autant plus que certains de ces chevaliers de la légalité vivent sous escorte. Ils ne baissent pas les bras. Beaucoup d'entre eux ont payé et beaucoup sont condamnés par la pègre et les puissants et terribles syndicats du crime.

Il est encore trop tôt pour se permettre de comparer la conscience de l'honneur et le sens de responsabilité des Algériens à ceux des Italiens. Ce que nous pouvons faire c'est juste indiquer à Berbericus la lutte de cette nation et sa vigilance soutenue contre ce fléau de corruption. Hommes politiques, juges, journalistes, écrivains, étudiants, parents et amis des victimes, citoyens, hommes et femmes, jeunes et moins jeunes,… tous sont prêts à payer de leurs biens et de leurs vies même pour contenir ce cancer des sociétés qui est la corruption.

Certes ces fils ont perdu leurs pères et cherchent d'en élaborer le deuil, mais ce qui les meut et les inspire le plus c'est surtout la détermination de maintenir éveillée cette garde contre la pègre. Le plus sublime dans tout ça c'est que les participants (et tous les citoyens) leur font sentir qu'ils ne sont pas seuls dans leur douleur et dans leur combat. Qu'ils ne sont pas seuls à se sentir fiers de leurs êtres chers perdus; que derrière eux, à leurs côtés et au milieu d'eux il y a aussi tous les citoyens venant de toute l'Italie pour combattre le même mal et pour les soutenir...

D.Lgs. 8 juin 2001, n. 231 est un curieux (pour moi) décret législatif italien qui a pour objet de discipliner la responsabilité administrative des personnes juridiques, des sociétés et des associations même privées de personnalité juridique. C’est dire quelle importance et quel intérêt les nations vives et éveillées accordent-elles à la lutte contre tous les fléaux qui pourraient menacer de près ou de loin la vie de la cité ou en altérer la bonne marche. Je ne sais pas si un instrument de cette nature existe chez nous, mais je voudrais seulement attirer l’attention de Berbericus que là dans les pays felix, on est justement felix parce qu’on est rigoureusement responsabilisé ; quiconque (personne réelle ou juridique) est individuellement tenue pour responsable de ses propres actes et en même temps il est co-responsable des actes de ceux qu’il a sous sa responsabilité.

J’aimerais bien que nos gouvernants aient un peu de la modestie des Italiens qui n’hésitent pas à se poser en élèves pour apprendre des autres comme ce magistrat, ancien de « Mani pulite », Piercamillo Davigo. Ce dernier parle avec admiration d'une espèce de test d'intégrité en vigueur aux Etats Unis. Test qui consiste à lutter contre la corruption en soumettant les responsables gérant les affaires de la cité à une épreuve où une police spéciale, par simulation, tente de corrompre un fonctionnaire, s'il tombe dans le piège, il est pris comme en flagrant délit (c’est prévu par la loi). S'il refuse, c’est signe qu'il est honnête et intègre.

Ça c’est l’Amérique (et l’Italie aussi), où les quatre pouvoirs (l’information est le 4° pouvoir) sont différenciés et vraiment indépendants et autonomes mais ils restent collaboratifs et complémentaires.

Chez nous, hélas, « Nos députés – comme le dit M. Aziza du Quotidien d’Oran, 20-05 – 09 - sont ligotés par une législation qui donne le plein droit de contrôle à l'administration au détriment du parlementaire. »

On peut dire de même pour ce qui concerne le pouvoir judiciaire et celui de l’information, qui sont encore à l’ombre du sceptre et des moustaches d’un autre age du pouvoir exécutif.

Le sens de la démocratie est la circulation fluide et libre de l'information dans la société; le citoyen a le devoir et le droit d'être informé sur les manœuvres des gouvernants concernant les deniers publics et l'intérêt général du pays. Nos intellectuels doivent peiner pour avoir "la licence pour dénoncer les travers de la société algérienne"; car enfin l’information donne aux opprimés « la science de leur malheur »... Et la bonne justice, celle indépendante, corrige ce malheur.

Mais convaincre Berbericus, est trop lui demander ! Nihil humanum a me alienum puto.

Toutefois ne nous laissons pas battre par les habitudes paresseuses et l’exécrable indifférence ; hasardons plutôt quelques conseils que, bien qu’ils ne soient pas exhaustifs, nous retenons pertinents, vu l’ampleur du mal et l’urgence d’agir.


 

  • Échange d’informations entre organismes et corps institutionnels chargés de lutter contre le fléau de la corruption.

  • Déclaration du patrimoine personnel des responsables et de toutes personnes morales ou physiques avant l’entreprise d’une charge, affaire, mission ou mandat publics et après le terme des dites responsabilités. Il faudrait aussi les contrôler durant l’exercice de ces fonctions surtout s’il s’agit des responsabilités de longues périodes.

  • Protection et prise au sérieux des dépositions des dénonciateurs, des plaintes des victimes, des assertions des témoins, des enquêtes des journalistes et des témoignages de toute personne, organisation ou institution indépendantes ou gouvernementales et même des repentis. Cela, sans tomber dans le torquemadisme ou la chasse aux sorcières. S'assurer de la vérité de leurs assertions ou de leurs supputations. Une personne est toujours digne de respect et est innocente avant de pouvoir prouver son implication dans un délit ou forfait.

  • Associer la société civile et les mass média à la lutte contre ledit mal.

  • Indépendance de l’organisme ou de la commission censés lutter contre la corruption. Ces organismes devraient publier périodiquement via presse, radio, Tv ou autre site Internet des informations sur « qui sommes-nous ? notre fonction, notre rôle, le bilan de notre entreprise ou responsabilité, les nouvelles perspectives et les problèmes encore non résolus… » et cela avec analyse objective des raisons des échecs de leur action et de leurs succès aussi. Il s’agit aussi d’évaluer les instruments juridiques et les mesures administratives afin d’optimiser leur efficacité pour mieux prévoir et combattre la corruption.

  • L’information par sensibilisation directe ou via spot publicitaire, réclames et affichage des limites et des droits du citoyen face à l’administration : douane, état civil, police, fisc, attribution des marchés publics et des autres licences qui ouvrent droit à quelque privilège social ou économique comme registres de commerce, permis de construction, visas de voyage ou de pèlerinage…

  • Éducation du citoyen, dès la tendre école, par les programmes éducatifs et par l'application de la loi.

  • L'application rigoureuse de la loi. Souvent ce n'est pas par manque de législation mais par manque de rigueur dans l'application des textes qu'on pèche.

  • La culture de l'interception sans tomber dans la nécrophilie médiatique et sans fouler des pieds la liberté individuelle du citoyen. C’est grâce à la justice que nous pouvons nous vanter de faire partie du monde moderne. Et quand il n’y a plus de justice, l’histoire la restaure et la rachète…

Que tout soit transparent, juste, humain et légitime donc ; car sans légitimité toute forme de pouvoir est vaine, ce qui favorise la corruption et la mort du corps social.

 

Ergo, ecce malum, ecce remedium

 

Je crois que le mal de l’Algérie est bien identifié et il consiste en cette cassure entre l’État et le citoyen. Le remède ne peut être que le travail pour souder cette cassure : il faut que l’État veille à instaurer la justice avant l’indulgence, la transparence des règles avant toute forme de prêches, l’État de droit avant celui de la répression, la solidarité (non l’assistentialisme) avant les petits intérêts d’une classe ou d’un poignée d’individus dits privilégiés.

« Ce territoire qui se nomma successivement Numidie, Maurétanie, Maghreb central et Régence d’Alger ne fut, avant 1962, jamais uni que par la domination étrangère. Le cycle infernal des invasions et des rébellions y a duré plus de deux mille ans. La gestation de la nation telle que nous la connaissons aujourd’hui a été interminable et souvent douloureuse. Les larmes et le sang ont coulé plus que de raison, façonnant une identité pétrie d’orgueil et de fierté. »

Marwane Ben Yahmed Jeune Afrique du 21-27 février 2010


 

Smari Abdelmalek

  

Nota bene :

Enfin, chers lecteurs, l'amélioration de nos idées restent tributaire de vos lectures vigilantes mais compréhensives, de votre soutien donc à nos efforts et de votre critique surtout. Merci !

 

 

 

 

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