Vues et vécus en Algérie et ailleurs. Forum où au cours des jours et du temps j'essaierai de donner quelque chose de moi en quelques mots qui, j'espère, seront modestes, justes et élégants dans la mesure du possible. Bienvenue donc à qui accède à cet espace et bienvenue à ses commentaires. Abdelmalek SMARI
L’œuvre chaotisante des USA ne va pas s’arrêter à la Libye d’autant plus qu’il faut avant tout maintenir vif et présent le spectre d’un ennemi extérieur, et Dieu seul sait combien les USA en ont besoin. Et c’est la cause fondamentale de ce vice cruel, foudroyant, d’agresser et de tourmenter des peuples entiers, les peuples de toute la terre, à commencer par les noirs et lesdits latinos de la même Amérique ! Car c’est là, l’unique stratégie pour maintenir cohésives les populations et ethnies qui forment les États-Unis et qui sont fondamentalement adverses et hostiles les unes aux autres, avec leurs 30-40 millions de Noirs, leurs 50-60 millions de dits Latinos. Chiffres qui peuvent créer une vingtaine de pays, chacun au moins aussi grand et aussi peuplé que la Libye de Kadhafi !
En second lieu les USA doivent chasser les concurrents chinois et indiens, surtout les dangereux et malveillants concurrents chinois(!), qui sont en train d’envahir le monde arabe, l’Afrique et le monde entier par leurs marchandises et leur influence.
Plutôt que démocratiser des peuples sous dictatures, les nations paternalistes et prédatrices visent leur asservissement et le pillage de leurs biens et de leurs ressources.
La politique n’est certes pas aussi morale ou tendre comme la veut un citoyen lambda, mais elle a sa propre éthique, une éthique statistique. Elle cherche de toute façon à contenter le maximum de la communauté, et tant pis s’il y a quelqu-un auquel sa couverture n’arrive pas. D’où la méfiance de ces frustrés envers la politique. Mais il y a frustrés et frustrés : chez nous par exemple non seulement les frustrés, mais la plupart des citoyens, se méfient de la politique, voire la répudient, et accusent leurs gouvernants de corruption, d'incompétence et de stupidité ; contrairement à ce qui se passe dans les nations civilisées où il n’y a pas de cassure létale entre gouvernés et gouvernants, même en cas de grandes difficultés. Là, dans ces pays rose bonbon, gouvernants et gouvernés arrivent toujours à s’entendre, dans le meilleur et dans le pire. Chez les tiers-mondains, il est impensable voire pas du tout souhaitable qu’il y ait un accord entre les citoyens et ceux qui les gouvernent. Là, dans ces pays rose bonbon, il y a de la poésie aussi dans l’art de faire politique ! Un homme politique d’une nation sereine comme l’Italie - une nation dont l’évolution naturelle n’a pas été entravée par des sabotages historiques de longue durée - peut même nous émouvoir jusqu’aux larmes. L’Algérie semble ne pas avoir d’hommes politiques comme ceux qu’on trouve dans ces nations sereines, ni de citoyens comme, par exemple, les Italiens qui comprennent le sens de la loi, de l’Etat et de la politique. Pour accéder à cet état d’évolution politique, il faut avoir à notre disposition des siècles de sérénité et d’exercice politique : deux ingrédients fondamentaux qui nous ont été confisqués par la domination étrangère, ottomane et française, durant cinq siècles environ. Des siècles que même une vraie révolution ne peut bruler, figurons-nous des fausses révolutions, des révolutions par procuration, des chaotisations !
Mais existe-t-il une justice qui ferait payer ces dictateurs-dans-la-maison-des-autres, pour leurs crimes avérés ? Bien sûr que non. C’est tout juste si on ose faire allusion à leurs comportements, pourtant dévastateur, gratuitement dévastateur.
Cependant une chose est sûre, ces révoltes ont racine et raison non pas contre les gouvernants de leurs pays, mais dans l’injustice planétaires perpétrée par les puissances prédatrices via FMI, Banque Mondiale, Veto du Conseil de sécurité de l’ONU, ONG férues de paternalisme et malades de Caritas urget, OTAN, trafiquants d’armes, assoiffés de pétrole et d’hégémonie. Et il n’y a pas que ces instruments nuisibles dans les mains de ces prédateurs, il y a aussi la chaotisation élevées à théorie, à système, à science !
L’on est arrivé à prêcher le chaos créateur, même si l’on sait très bien que le progrès et la prospérité des nations damnées n’adviennent que dans la paix, l’ordre et la sérénité. Mais les prédateurs ont juré de n’épargner aucun moyen (et – putain !- des moyens, ils en ont) pour venir à bout de ces nations qui osent aspirer à la vie dans la liberté, la justice et la prospérité. Ils les veulent toujours pauvres, toujours ignorantes, toujours vaincues et sans défense afin de les exploiter et les dépouiller tranquillement de leurs richesses et de leurs territoires. De toute façon, une action accomplie par procuration est une action qui demeure toujours aliénée, inachevée et contre-productive, car elle prend en otage perpétuellement les clients auxquels elle est refilée et fait d’eux des êtres vulnérables, soumis et dépendants.
Cette chaotisation a provoqué chez ces damnés de la terre une forte propension à bouger, à s’en aller loin d'un chez-eux devenu enfer. Et ainsi ils tombent, poings et pieds liés, dans le giron des puissances prédatrices où ils seront personae non gratae. Ces puissances égoïstes feignent d’ignorer que l’instinct est aveugle et sourd aux sons et aux couleurs de la géographie, de ses frontières artificielles, des faux territoires. Le seul territoire que l’instinct reconnaît est le territoire éthologique, biologique : le territoire mobile qui se déplace avec l’organisme et avec tout ce qui constitue l’espace vital de cet organisme. En outre ces puissances égoïstes feignent d’oublier que l’homme est en soi une ressource inépuisable, même s’il est nu et n’a pas le sou – on a vu, dit-on, un roi nu - ; il suffit de savoir l’orienter et en apprécier les potentialités illimitées, et le voilà roi !
Et ça, c’est le rôle de la classe politique. D’autant plus, en étant sous la forte pression des forces hostiles, nos gouvernants sont pris au dépourvu et semblent incapables de réaliser ce pour quoi ils sont au pouvoir. Donc, si nous voulons vraiment éradiquer ce prurit de la bougeotte, que nous partageons avec d’autres espèces animales, il est nécessaire que les ONG, les citoyens, la société civile, les politiciens, les intellectuels, les artistes de nos pays réciproques, prédateurs et proies, travaillent près nos gouvernements respectifs pour les sensibiliser contre l’économie de l’exploitation et contre la culture belliciste, ces deux poumons de l’injustice internationale.
En attendant, que les états des pays rose bonbon s’arrêtent d’abord de créer les guerres dans les pays de la misère. Qu’ils s’arrêtent de faire semblant d’aider ces malheureux en leur vendant des armes et des poisons radioactifs et d’autres instruments de la mort et de la destruction. Qu’ils s’arrêtent de faire semblant de les aider en semant la zizanie entre les membres d’une même communauté et en infestant leurs pays de soldats étrangers et de mercenaires. Si vraiment, de la hauteur de leur Olympe, ces pays bons-samaritains voulaient bien aider les damnés de la terre, ils pourraient par exemple commencer par leur libérer leurs terres fertiles, les libérer de leurs jougs, leur procurer des livres et leur enseigner une bonne éducation à la paix et au respect entre les peuples. Or qu’est-ce qu’ils font, ces béats habitants de l’Olympe ? ils enseignent à leurs parents pauvres le malheur de mourir écrasés ou de vivre humiliés.
Tout le monde sait qu’il n’y a pas écoles plus pertinentes que ces deux injustices (oppression et humiliation) pour cultiver chez les peuples opprimés une double perversion : l’amour de la haine et de la médiocrité et le désir de la vengeance et de la cruauté. Qu’ont-ils à perdre les pays rose bonbon s’ils acceptent parfois, eux aussi, de cueillir un peu de mauvaises cerises (ne serait-ce que pour en libérer l’arbre), se faire de l’autocritique, reconnaître leurs responsabilités passives ainsi que celles actives, surtout, dans la production et l’alimentation de ces fléaux qui rongent les pays faibles ?
Ça, dans le monde des gentilles alouettes…
Mais qu’en est-il ailleurs chez les nations prédatrices, télécommandeuses des révolutions par procuration ? En voici un exemple, celui du maitre du monde, l’empire US. Qu’en est-il de cette Amérique même, avec ses bombes intelligentes, ses tomahawks, ses caramels, son père Noël, ses chimères de Hollywood et son coca-cola ? Ce n’est pas parce que l’Amérique est une superpuissance militaire qu’elle domine les cultures du monde, mais elle les domine grâce à sa capacité économique prodigieuse, à son prestige culturel, à son savoir-faire, à sa volonté de faire la locomotive de notre époque et, surtout, aux apports de génie et de finances des différentes ethnies et cultures (parvenues de tous les coins de la planète) qui constituent son tissu social. L’Amérique c’est un peu la capitale du monde : elle est grande, puissante, cosmopolite, arrogante et importante, comme Alger pour les Algériens ou Paris pour les Français. Il y a en Amérique plus de 4 000 établissements d’enseignement supérieurs dont 1 400 universités, et le pays leur consacre environ 3 % de PNB quand, en Europe, l’enseignement supérieur est deux fois moins riche, en moyenne, avec environ 1,5 % du PNB. Malgré les frais de scolarité exorbitants, entre 20 000 et 40 000 dollars par an, les étudiants américains ont cependant accès à des bourses et des emplois rémunérés (« work-studies »). 82 % d’une classe d’âge entre dans l’enseignement supérieur aux Etats-Unis (quand ce pourcentage stagne à 59 % au Royaume-Uni, 56% en France et 48 % en Allemagne). Au-delà des statistiques, toujours difficiles à comparer, un point indiscutable est la vitalité culturelle des campus américains qui hébergent 2 300 salles professionnelles de théâtre et de musique, 700 musées d’art ou galeries professionnelles, des centaines de festivals de cinémas, 3 527 bibliothèques (dont 68 avec plus de 2,5 millions de livres, dont celle d’Harvard qui est la seconde au monde après la bibliothèque du Congrès), 110 maisons d’édition, environ 2 000 librairies, 345 salles de concerts de rock, plus de 300 radios universitaires et autant de labels de musique indépendants. C’est ce genre de dynamisme culturel époustouflant que l’autre visage des USA, son côté Mister Hyde, tend à priver les citoyens du monde misérable, en leur enlevant la sérénité de penser à la vie et à la culture des arts et des sciences.
Abdelmalek Smari